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21 août 2018

Hydro-Québec prête à aller en Cour Suprême contre des citoyens de Lanaudière

Le litige perdure entre la société d’État et ces résidents au sujet de la ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île

La ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île doit relier le Lac-Saint-Jean (photo) à la boucle métropolitaine où la demande d’électricité est en croissance.

©Photo - gracieuseté

La ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île doit relier le Lac-Saint-Jean (photo) à la boucle métropolitaine où la demande d’électricité est en croissance.

JUSTICE. Hydro-Québec, en litige judiciaire depuis novembre 2015 contre des citoyens de Lanaudière, a l’intention de déposer une requête devant la Cour Suprême pour faire renverser une décision récente de la Cour d’appel du Québec leur étant favorable et pouvant, du coup, créer un précédent pour des dizaines de milliers de lots dans la province.

Dans cette décision de la Cour d’appel du Québec, rendue le 25 mai dernier, trois juges donnent raison aux six citoyens et à l’entreprise qui se battent depuis trois ans contre Hydro-Québec au sujet de l’implantation de la ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île dans la servitude adjacente à leurs propriétés appartenant à la société d’État et où passe déjà une ligne électrique.

Les trois magistrats ont conclu qu’Hydro-Québec « ne possède pas de droit réel » lui permettant d’utiliser leurs propriétés pour faire passer la nouvelle ligne électrique Chamouchouane Bout-de-l’Île. Selon leur analyse, Hydro-Québec détient des servitudes pour le passage de la ligne existante, Jacques-Cartier-Duvernay, mais elle ne peut, sans expropriation additionnelle, construire la ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île sur leurs lots.

Cette conclusion rejoint ce que les citoyens alléguaient depuis le début du litige judiciaire les opposant à Hydro-Québec concernant son projet de relier le Lac-Saint-Jean à la boucle métropolitaine où la demande en électricité est en croissance. Ceux-ci, selon nos informations, ont déboursé, jusqu’à maintenant, plus de 100 000$ en frais de justice pour débattre avec Hydro-Québec afin de faire valoir leur point.

Avis contraire

En rendant cette décision favorable aux citoyens, les trois magistrats ont émis un avis totalement contraire à celui rendu par le juge de première instance l’an dernier. Celui-ci avait penché en faveur d’Hydro-Québec et avait alors ordonné aux citoyens d’arrêter de faire obstruction au développement du projet de la ligne électrique. Il avait aussi conclu qu’Hydro-Québec avait le droit de passer sa nouvelle ligne de 735 kV.

Il avait aussi refusé que « leur demande de dommage et intérêts pour l’usage non autorisé des servitudes et d’indemnisation pour certains inconvénients liés à des troubles de voisinage » soit entendue, mais les juges de la Cour d’appel du Québec l’ont autorisée.

Une lutte à poursuivre

Cette victoire, les citoyens ont cependant à peine pu la savourer puisqu’Hydro-Québec a rapidement annoncé son intention de porter l’affaire devant le plus haut tribunal du pays.

« Les citoyens sont arrivés à leur but. Le jugement de la Cour d’appel du Québec est encourageant, mais c’est sûr que ce n’est pas terminé », a relevé David Arbour, ex-président du comité Citoyens sous haute tension ayant été dissous dernièrement.  

« J’ai l’intention de me battre jusqu’au bout », a affirmé à L’Action une des citoyennes mis en cause qui a préféré ne pas être nommée.

Selon elle, la société d’État ne fait qu’« étirer le débat » pour que « le monde débarque ».

« L’audition devant la Cour Suprême – si elle a lieu – s’annonce épique », soutient de son côté le mari d’une des appelantes très au fait du dossier et qui a aussi demandé à ne pas être nommé.

Sursis d’exécution

Contactée par L’Action, la société d’État a indiqué qu’elle maintenait son intention de déposer une requête devant la Cour Suprême pour se pourvoir de la décision de la Cour d’appel du Québec parce qu’elle considère que la question de la portée de ses droits de servitude est « importante ».

Hydro-Québec continue de croire qu’elle détient un droit clair d’implanter la ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île sur la servitude existante qu’elle a acquis dans les années 1970, auprès des propriétaires du temps, pour y construire la ligne Jacques-Cartier-Duvernay et d’autres lignes de transport. Elle a aussi, par le passé, mentionné à maintes reprises avoir déjà payé à cette époque tous les dédommagements requis à cette servitude.

La société d’État a jusqu’au 25 août pour déposer sa requête devant la Cour Suprême. Entre-temps, elle a obtenu, le 11 juillet, un sursis de l’exécution du jugement jusqu’à ce qu’elle dépose sa requête, ou jusqu’à ce que la Cour Suprême se prononce sur l’affaire, s’il y a lieu.  Ainsi, le jugement rendu par la Cour d’appel du Québec ne s’applique pas, pour l’instant.

Des « conséquences majeures » anticipées

Dans sa demande de sursis, Hydro-Québec allègue que le jugement pourrait créer un précédent, avoir des conséquences « majeures » et « mettre en péril le développement, la mise à niveau et la fiabilité » de son réseau.

Elle argue que ce jugement la place « en situation potentielle d’irrégularités sur plusieurs autres projets en cours de réalisation ou anticipés sur l’ensemble de son réseau, puisque des dizaines de milliers de lots sont dans une situation semblable à celle des lots appartenant aux citoyens ayant fait appel ».

Elle ajoute que les impacts résultant de cette situation peuvent être majeurs puisque les délais liés aux négociations qui en résulteraient et les ressources « très importantes » requises pour effectuer le travail de régularisation des droits qu’elle détient pourraient causer des délais dans la mise en service de projets, « sans compter les nombreuses réclamations en dommages par les propriétaires des lots touchés auxquelles Hydro-Québec pourrait être exposée ».

La construction se poursuit

Les propriétaires mis en cause dans cette affaire ne se sont pas opposés à la demande de sursis d’Hydro-Québec.  

La construction de la ligne électrique n’est d’ailleurs pas contestée par eux. Devant la Cour d’appel du Québec, ils ont indiqué qu’ils réalisaient bien « qu’ils n’empêcheront pas la construction de la ligne Chamouchouane-Bout-de-l’Île par leur recours », mais vouloir « une juste compensation ».

Ainsi, la construction de la ligne électrique Chamouchouane-Bout-de-l’Île, évaluée à 1,34 G$, dont 900 M$ ont déjà été engagés, peut se poursuivre afin de respecter le nouvel échéancier, retardé au 30 mai 2019, en raison d’une progression moins rapide des travaux, notamment. La mise en service devait initialement avoir lieu le 28 novembre prochain.

Chaque année, la Cour Suprême entend environ 10% des causes qui lui sont soumises par demande d’autorisation de faire appel d’un jugement.

Outre les avis d’appel de plein droit, l’intérêt public est le premier critère qu’une cause doit satisfaire pour être entendue devant les juges y siégeant.

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