Carrières dans votre région Avis de décèsÉdition Électronique Rabaischocs.com

Recherche

Recherche par terme

Journaliste

Date de parution

_

Catégories

Culture

Retour

22 mars 2024

Sarah Yergeau - syergeau@medialo.ca

Une artiste fait vivre le patrimoine à travers ses histoires

Création

Audrey Wilhelmy Sainte-Élisabeth

©Photo gracieuseté - L'Action d'Autray

La cours arrière de la maison d'Audrée Wilhelmy comporte un jardin de 1500 pieds carrés de culture et d’arbres fruitiers, ainsi que des jardins de fleurs médicinales et à bouquets.

L’autrice et artiste multidisciplinaire Audrée Wilhelmy, il y a de cela quatre ans déjà, a quitté le tumulte incessant de la métropole montréalaise pour venir s’installer dans les champs abondants et la campagne qui borde la municipalité de Sainte-Élisabeth. Cette maison ancestrale qu’elle habite, plus vieille que la municipalité elle-même, elle l’a d’abord imaginée, écrite, puis retrouvée.  

« Quand la municipalité de Sainte-Élisabeth a été fondée, soit vers 1825, la maison existait déjà. Les experts disent que ça fait au moins 25-30 ans qu’elle était construite à ce moment », confirme l’artiste en entrevue avec L’Action D’Autray.  

Elle ajoute que malgré les nombreuses années qui ont passé, c’est le travail de restauration des différents propriétaires au fil des époques qui font que le bâtiment a gardé un cachet.  

Audrée Wilhelmy dévoile que ce patrimoine bâti, elle l’a avant tout couché sur papier, avant de se rendre compte qu’il était bel et bien réel. « C’est drôle, parce que j’ai écrit un livre qui se passait dans un contexte agricole, sur le chemin des oies, juste avant de trouver la maison, où il y a des milliers d’oies qui passent chaque année. Donc, c’est comme si la fiction avait précédé la découverte de ma maison, c’est comme si je l’avais écrit pour moi. Je pense que l’attachement que j’ai pour ma maison vient aussi de tout ça, du fait qu’elle est apparue par l’écriture avant même d’exister en vrai. »  

Cette trouvaille a été une révélation pour elle. « C’est très particulier, ça s’est vraiment fait sur un coup de tête. J’étais en train de faire changer mon pare-brise en me disant que mon loyer me coûtait cher, puis j’ai vu cette maison et je me suis dit : « Oh mon dieu, c’est chez moi ! » En allant la visiter, mon senti a été confirmé. Question de rassurer ma mère, qui était inquiète car je n’avais jamais habité en campagne, j’en ai visité une autre, mais mettons que mon choix était déjà fait », lance Audrée en riant.  

Elle admet que son environnement immédiat façonne énormément son art. « En littérature, qui est mon secteur principal, je travaille beaucoup dans un non-temps non-lieu. Ainsi, ma maison correspond super bien à ce genre d’intemporalité là, parce que c’est comme si c’est une maison qui ne se peut pas, dans le sens qu’à l’époque où elle a été construite, jamais elle ne ressemblerait à ce à quoi elle ressemble aujourd’hui, mais en même temps, aujourd’hui on ne pourrait plus faire de maison comme ça. On retrouve dans mon art ces temporalités qui s’additionnent et se superposent pour donner des espaces soit romanesques, soit concrets. » 

D’ailleurs, elle précise que c’est justement cette fusion qui l’anime tant. « Dans ma pratique, qui est axée sur le féminisme, les savoirs traditionnels et les divers modes de transmission, ce que j’aime le plus, c’est de conjuguer toutes ces formes ensemble, de faire en sorte que les techniques d’impressions artisanales se mélangent à, par exemple, de la fabrication de teinture qui, elle, va servir à teindre les tissus que j’ai tissés pour faire la reliure de mes livres. » 

Des objets qui parlent d’eux-mêmes  

 Audrée qualifie sa maison de « dame âgée » ou encore de « cabinet de curiosités », où chaque chose est inspirante. « Pour moi, c’est précieux et hyper stimulant de m’entourer d’objets empreints de vécu qui racontent chacun leur histoire. Ça c’est la partie romanesque et littéraire de ma démarche. Il y a plein d’objets de plein d’époques qui ont tous des significations différentes ; j’ai des meubles de couvents et il y a déjà quelqu’un qui a accouché sur ma table de cuisine. » 

Parmi les quatre ateliers qu’abrite sa maison, un espace est dédié à ses presses artisanales, qu’elle utilise dans sa démarche multidisciplinaire pour imprimer du texte avec des caractères de plomb. L’une d’entre elles, âgée d’environ 150 ans, démontre bien comment l’art peut s’inscrire dans le patrimoine. « L’histoire de cette presse part de l’artiste Paul Livernois qui, dans les années 70, l’a achetée à un marchand de jouets, qui lui avait dit : « Je te la vends 100$, à condition que tu ne la revendes jamais plus cher que 100$. »  

M. Livernois a accepté l’offre et a utilisé la presse tout au long de sa carrière. Quand il a repéré Audrée Wilhelmy par les médias sociaux, il lui a proposé la presse avec les mêmes conditions que celles établies par le marchand. « On s’entend que ce sont des presses qui ont une valeur de 15- 20 000$ mais cet engagement de ne la revendre jamais plus que 100$ doit rester vrai et authentique, car la presse est faite pour être transmise pour son patrimoine et son histoire. C’est une question d’entraide et de solidarité. » 

Audrée explique que ce n’est pas tant ce qu’elle imprime que l’objet lui-même, accompagné d’un désir de transmettre, qui la stimule. « Les potentialités des possibles m’ont toujours interpellée. J’aime comprendre l’objet, déceler à quoi il sert, puis en détourner en partie l’usage, l’amener ailleurs. C’est plus dans l’aspect créatif qu’historique que ça me parle. Je ne le fais pas dans une perspective de sauvegarde, je le fais parce que ça m’amuse. Je ne ressens pas l’urgence de connaître tout l’historique des objets que j’accumule. » 

Audrée Wilhelmy signe une chronique carte blanche sur l’autonomie vestimentaire. Elle confectionne effectivement la plupart de ses vêtements en matières naturelles. « Je porte beaucoup de jupes et de robes longues, je suis assez traditionnelle. Mes vêtements sont en laine, en lin et en chanvre, ils vont me durer très longtemps. Parfois, c’est quelqu’un que je connais qui me les faits, donc j’ai l’impression de porter la présence de quelqu’un sur moi littéralement. » 

Sa prochaine chronique abordera son jardin de 1500 pieds carrés de culture et d’arbres fruitiers dans sa cour, qu’elle dit n’avoir cessé d’agrandir au cours des quatre dernières années.  

Ce cinquième été va donc lui permettre d’entretenir ses sept pruniers, ses pommetiers, ses poiriers, ses arbustes fruitiers et ses jardins de fleurs médicinales et à bouquets, qui est d’ailleurs son tout premier jardin à elle seule. « Dans la famille de mon père, les fleurs c’est la vie, mes parents ont toujours eu des jardins et mes grands-parents aussi, j’ai baigné là-dedans. Même si je ne m’en souviens plus, mon corps s’en rappelle, ça nous imprègne. » 

De plus, l’artiste est active de plusieurs façons dans sa région. « J’enseigne beaucoup par le biais de Culture Lanaudière. Je fais des expositions un peu partout dans la région, je commence à connaître les infrastructures, je sens que ça devient plus chez moi pour vrai. » 

Audrée Wilhelmy conclut en exprimant toute sa reconnaissance et sa joie envers ce lieu qu’elle chérit tant. « J’ai aussi la chance d’avoir une dame qui m’aide beaucoup, elle fait de la magie. On prend soin de la maison, la maison prend soin de nous. Il y a quelque chose de très réciproque dans cet espace. Plus jeune, je ne m’étais jamais projetée dans des lieux, mais plus dans des sensations, et cette demeure, c’est la sensation exacte. L’adolescente que j’ai été serait tellement contente de savoir que j’habite là ! », dit-elle en riant de bon cœur. 

Audrée Wilhelmy Sainte-Élisabeth

©Photo gracieuseté - L'Action d'Autray

L’artiste Audrée Wilhelmy habite dans une maison ancestrale à Sainte-Élisabeth depuis quatre ans déjà, accompagnée de ses deux chiens.

Commentaires

Inscrivez votre commentaire

Politique d'utilisation Politique de confidentialité

Agence Web - Caméléon Média